SEMINAIRE MARCHES PUBLICS

Année universitaire 2003 – 2004

 

 

 

 

Les Prix dans les Marchés Publics

 

 

 

Introduction

 

        I.      La détermination du prix

 

A.    L’obligation de stipuler un prix

 

B.    L’établissement du prix

 

1.      Le prix initial

2.      Le prix de règlement.

 

3.      Les marchés à prix unitaire 

4.      Les marchés à prix forfaitaire

5.      Les marchés mixtes

 

 

      II.      Le principe d’intangibilité du prix

 

En principe, les marchés sont conclus à « prix ferme et définitif »

 

 

    III.      L’aménagement du principe : modification, révision et variation du prix du marché

 

 

1.      Le prix actualisable

 

2.      Le prix ajustable

 

3.      Le prix révisable

 

4.      Le prix provisoire

 

5.      Le prix rectifié

 

6.      Les variations de prix et les variations imprévues des prestations        

 

a) Dans les marchés à prix unitaire

b) Dans les marchés à prix forfaitaire

 

 

 


 

Introduction

 

Le prix est un critère fondamental de la notion de marché public elle-même. Il est au centre de toutes les procédures d'attribution des marchés publics et constitue également un élément essentiel de l'exécution de ces marchés.

On retrouve la question du prix à tous les niveaux de la procédure, de la définition des besoins, aux choix de la procédure de passation jusqu’à l’exécution du contrat en passant bien évidemment par son attribution.

Aussi, l’importance du prix ne semble pas s’éroder sous l’effet des réformes successives du code. En témoigne les dispositions relatives au prix dans la version 2004 du NCMP, à la lumière des recommandations du Manuel d’Application du CMP 2004, on devine, même si cela reste énoncée d’une façon encore pudique, que le prix reste une préoccupation essentielle du législateur.

Pour l’attribution du contrat, ce critère serait resté prépondérant, on s’en doute  pour ce qui concerne les marchés de fourniture et de travaux même si cela est moins vrai pour les marchés de services. Cette importance s’explique notamment par l’exigence d’une bonne gestion des deniers publics qui, dans la pratique encourage, officieusement mais prudemment, l’AP à retenir le candidat le moins-disant, et cela malgré l’exigence de pondération ou de hiérarchisation des critères et la volonté du législateur à travers la rédaction du code d’encourager l’AP à retenir non pas le moins disant mais le mieux disant, c'est-à-dire en ne concentrant pas toute son attention sur le prix mais sur le rapport qualité/prix qui doit conduire à l’achat le plus efficace, acheter plus simplement, mieux et moins cher, tout en garantissant le respect des grands principes de la commande publique. Si l’on regarde un peu les évolutions, cela tourne autour d’une plus grande ouverture à la négociation (dont le prix peut-être un des éléments), du recours possible au critère unique du prix si cela est conforme à l’objet du marché, etc.  Parallèlement, il est recommandé à l’AP d’avoir une parfaite définition de ses besoins et la meilleure connaissance possible du marché pour acheter au meilleur moment et au meilleur prix. La possibilité de rejoindre un groupement  lui est encore ouverte, toujours dans l’optique de parvenir à un achat efficace par la mutualisation des coûts.

 

Précisément parce que la question du prix recouvre toute la matière des marchés publics, on n’abordera pas la question aujourd’hui résolue du prix comme critère d’identification du marché public (au sens de l’arrêt Préfet des Bouches du Rhône de 1996, en tenant compte des apports du CMP 2001 combinés aux dispositions de la loi MURCEF). Ne sera pas non plus abordée la question plus controversée des « marchés sans prix » (cf. concession d’endigage, et plus particulièrement les contrats de mobilier urbain avec les avis divergents du CE qui ne semble pas encore fixé sur la nature du contrat : MP, DSP, Conv. D’Occupation du Dom. Pub ? Les enjeux sont importants car c’est de la qualification que dépend le régime applicable et cela va de l’absence de procédure, à l’application de la loi de 1993 ou encore la soumission au CMP). Ne sera pas abordée non plus, la question du prix au regard des règles de concurrence, notamment le problème des offres anormalement basses etc. Il ne s’agira donc pas d’exposer les rapports entre le prix et les marchés publics, mais plus spécifiquement et conformément à l’énoncé des prix dans les marchés publics.

 

Tout d’abord nous verrons que ce prix doit être déterminé ou déterminable (I. La détermination du prix). Dans une seconde partie nous verrons que ce prix bien, qu’en principe, intangible (II. Le principe d’intangibilité du prix) peut cependant faire l’objet de modifications (III. L’aménagement du principe : l’éventuelle modification ou révision du prix en cours d’exécution du marché), on verra ainsi que, les textes et la pratique, sous le contrôle du juge, l’admettent, dans un assez grand nombre d'hypothèses.

 

 

        I.      La détermination du prix

 

Le prix du marché revêt une double caractéristique :

- c'est un élément constitutif du marché: il fait partie des mentions obligatoires. Il s'agit d'une formalité substantielle dont l’omission entraîne la nullité du contrat.

- c'est encore la rémunération du titulaire du marché : le prix est égal à la rémunération de l'entreprise à laquelle a été confiée l'exécution de la prestation (art. 12 du nouveau Code des marchés publics). Le prix est donc déterminé en fonction des prestations prévues dans le marché. Il doit couvrir toutes les charges supportées par l'entreprise, y compris les charges fiscales, parafiscales, etc. Le prix est, de la sorte, irrévocable et les cahiers des charges doivent préciser ce qu'il recouvre.

Le prix du marché doit donc obligatoirement stipuler un prix, mais selon des formes assez variées.

 

A.    L’obligation de stipuler un prix

 

La stipulation d’un prix est une obligation [1], elle est même une condition de la validité du marché. En effet, le marché public est un contrat synallagmatique : le titulaire du marché s'engage à exécuter une prestation en contrepartie d'une rémunération et, réciproquement, l'Administration s'engage à en payer le prix en règlement  de la prestation exécutée. Si pour la personne publique l'objet du marché, ce qui justifie qu'elle se lie par le contrat avec un tiers, est cette prestation même, pour le titulaire du marché, c'est la rémunération qu'il entend percevoir en règlement  de son labeur qui justifie son engagement vis-à-vis de la personne publique. Ainsi, le prix est tout autant l'objet du marché que la prestation qu'il rémunère. Il en résulte qu'un marché doit tout aussi nécessairement définir le prix (ou les modalités de son calcul) que la prestation.

 

Ainsi, en l'absence de toute précision sur le prix ou sur les conditions de paiement, le marché doit être regardé comme ne satisfaisant pas une condition essentielle de validité  (CE, 9 mars 1960, Massida : Rec. CE, p. 187). Il est nul et de nul effet – d'une nullité qui est même d'ordre public  (en ce sens CE, 28 mars 1980, Sté « Cabinet 2000 », req. n° 7703 : RD publ. 1991, p. 523. – 8 déc. 1982, Sté Losfeld-Industries c/ min. déf. : AJDA 1983, p. 263, note P. Subra de Bieusses. – 20 mars 1987, Sté Éts Louis Méhault et Fils c/ Cne Guer, req. n° 38905 : RD publ. 1988, p. 1415 ; Juris-Data n° 042073. – TA  Versailles, 24 mars 1994, Préfet Essonne c/ Dpt Essonne : Rec. CE, tables, p. 1036 ; CJEG 1994, p. 552 concl. X. Prêtot. – V. aussi en ce sens l'analyse développée par D. Pouyaud, La nullité des contrats administratifs, LGDJ, 1991, n° 207 s.).

 

Le contenu du prix

Le prix du marché comprend au moins les charges liées à l'exécution par l'entreprise de ses prestations, auxquelles il faut ajouter les dépenses communes à l'ensemble des entreprises, et les charges de TVA. « Sauf stipulations contraires, le prix est donc réputé comprendre toutes les dépenses et charges liées à ou résultant de l'exécution du marché, y compris les charges salariales, le coût des matériaux et des consommables, les frais généraux, les impôts et les taxes etc. Ainsi, interviennent à la fois des éléments purement contractuels et des éléments légaux ou réglementaires imposés essentiellement par les législations fiscale et sociale en vigueur à la date de la soumission ou de l'offre. »[2]

 

B.    L’établissement du prix

 

S’agissant de l’établissement du prix, il convient de distinguer préalablement le prix initial et le prix de règlement :

 

-         Le prix initial est inscrit dans le marché, c'est celui qui résulte de l'appel d'offres. Il a été établi aux conditions de base définies par le marché, et c'est un prix définitif. Cela signifie, sous réserve de ce qui sera dit plus loin, que l'entreprise doit exécuter le marché et ne peut pas revendiquer des compléments de prix, alors même qu'elle rencontre des sujétions qu'elle n'a pas prévues, c’est le principe d’intangibilité du prix.

 

-         Le prix de règlement est celui qui intéresse le comptable public. C'est le prix qui est effectivement payé à l'entreprise titulaire du marché. Le montant à régler en exécution du marché peut différer du prix initial, en raison de l'évolution des prix, de la variation des quantités livrées au regard des quantités prévues, ou lorsque des pénalités de retard ou des intérêts moratoires sont à régler.

 

Le prix initial est donc la rémunération de base du titulaire du marché dont le montant est fixé dans le contrat, selon le type de marché retenu.

 

 

L’art 16 du NCMP 2004 (même numérotation que le code 2001 et ex ; art 78 et 275 de l’Ancien CMP) distingue :

 

-         Les marchés à prix unitaire : Selon cet article, les "prix unitaires sont appliqués aux quantités réellement livrées ou exécutées". Le prix est donc unitaire, lorsqu'en le multipliant par la quantité effectivement livrée ou exécutée, on détermine le montant dû (art. 11-23 du CCAG-Travaux, par exemple). Autrement dit, dans le contrat, on connaît le prix de la prestation, mais les quantités à payer ne sont indiquées que de façon prévisionnelle (par exemple, art. 10-2 du CCAG-Travaux). Le prix de règlement est proportionnel aux quantités effectivement livrées ou exécutées. Le montant définitif du marché ne peut, par conséquent, être déterminé qu'à la fin du marché. Lorsque le prix est lié à la quantité de prestation exécutée, il y a lieu de retenir non seulement les travaux expressément prévus au marché, mais aussi tous ceux qui, non prévus, en sont techniquement ou matériellement indissociables  (CE, 14 nov. 1984, OPHLM Paris c/ Entreprise Olivo, req. n° 27584, 41569).On utilise le plus souvent cette forme de prix pour des marchés destinés à procurer des fournitures courantes et facilement individualisables (marchés alimentaires, fournitures de bureau et de papiers). Elle concerne, parfois, des prestations plus complexes, tels les ponts normalisés de voirie exécutés en plusieurs exemplaires.

 

 

 

-         Selon l'article 16 du Code des marchés publics, un prix forfaitaire doit remplir deux conditions : la forme du prix doit être indiquée et les prestations doivent être déterminées. Les documents du marché doivent énoncer très clairement si le prix forfaitaire est appliqué à tout ou partie du marché. Lorsqu'il concerne l'ensemble du marché, ce marché est dit "à prix global forfaitaire".Le prix forfaitaire est fixé au moment de la passation du marché et il ne varie pas en fonction de la quantité de prestations. Il est donc impératif, dans ce type de marché, de déterminer les prestations à réaliser, avec la plus grande précision, en fournissant notamment aux candidats des dossiers techniques qui leur permettent de mesurer l'étendue de leurs obligations. Un marché peut comporter à la fois des prix forfaitaires et des prix unitaires. Il revient aux documents du marché de fixer les modalités de détermination du prix. Il est possible d’insérer des clauses incitatives dans les marchés à prix forfaitaire (clauses incitatives liées aux délais d'exécution, à la recherche d'une meilleure qualité des prestations et à la réduction des coûts de production…).

Le. CCAG TP précise notamment  (art. 11.22) que « les différences éventuellement constatées, pour chaque nature d'ouvrage ou chaque élément d'ouvrage, entre les quantités réellement exécutées et les quantités indiquées dans la décomposition de ce prix,... même si celle-ci a valeur contractuelle, ne peuvent conduire à une modification dudit prix ; il en est de même pour les erreurs que pourrait comporter cette décomposition ». Dès lors que les incidents rencontrés en cours d'exécution du marché n'excèdent pas ce qu'il était raisonnablement possible de prévoir lors du dépôt de l'offre ou de la soumission, le titulaire doit en assumer seul les conséquences financières  (CE, 5 mai 1971, Sté Entreprise Dodin : Rec. CE, p. 329).

 

 

      II.      Le principe d’intangibilité du prix

 

En principe, les marchés sont conclus à « prix ferme et définitif »[3] sauf hypothèse exceptionnelle de l’art. 18 NCMP 2004 (même numérotation que 2001 et ancien art. 80 de l’ACMP). En principe, sauf disposition exceptionnelle prévue à l’art 18 relative au « prix provisoire », le prix ne peut être unilatéralement modifié par l’administration (cela résulte de plusieurs arrêts déjà anciens notamment CE, 16 mai 1946, Commune de Limoges[4]) et moins encore unilatéralement par le cocontractant.

 

Qu'il soit forfaitaire ou unitaire, le prix est ferme lorsqu'il ne peut pas être modifié à raison des variations des conditions économiques  (NCMP, art. 17). Cette règle met tant l'administration contractante que le titulaire à l'abri des aléas majeurs  (selon les objectifs du décret n° 79-992 du 23 novembre 1979). Il est cependant permis de l'aménager et de prévoir une évolution des clefs de calcul du prix de règlement 

 

 

    III.      L’aménagement du principe : l’éventuelle modification ou révision du prix en cours d’exécution du marché

 

Le prix d'un marché public doit donc être déterminé et déterminable. Qu’il s’agisse d’un prix unitaire ou forfaitaire, celui-ci est, en principe, ferme et définitif. Toutefois, il n'est jamais possible de faire abstraction des conditions matérielles de préparation et d'exécution du marché, ni de l'environnement extérieur. C'est pourquoi les textes et la pratique, sous le contrôle du juge, admettent, dans un grand nombre d'hypothèses, que les prix des marchés publics locaux sont des prix modifiables. Les textes ont donc autorisé les prix ajustables et les prix révisables,et dans certains cas les prix provisoires. Ils permettent les rectifications de prix pour erreur matérielle. La pratique et la jurisprudence acceptent des variations de prix liées à des modifications imprévues de la prestation.

Tous les aménagements du prix s’opèrent toutefois sous le contrôle du comptable public, qui interviendra  lors du contrôle des calculs de la liquidation du prix du marché. Ce prix étant nécessairement payé avec des deniers publics, les comptables ont, en effet, un rôle prépondérant dans son contrôle (CE 19 juin 1991, Ville d'Annecy c/Dussolier).

 

Le principe d’intangibilité du prix du marché ne signifie pas que le prix d’un marché ne puisse en aucun être modifié en cours d’exécution. Il peut l’être par accord des parties, dans les limites générales tenant, entre autres, au régime des avenants

 

  1. Le prix actualisable

 

Le prix ferme peut aussi être actualisable. L'article 17, opère un renvoi au décret d’application pour définir les modalités d'actualisation du prix ferme. Jusqu’à présent, l'actualisation était possible lorsqu'un délai de trois mois s’écoulait entre le moment de l'établissement du prix et le moment où le titulaire débutait l’exécution de sa prestation. Ce type de prix peut s’avérer intéressant pour l'acheteur public, lorsqu'il estime qu'un temps assez long va séparer deux phases. Pour le titulaire du marché, c'est une garantie de prix.

Cette actualisation est seulement obligatoire pour les marchés de travaux et les marchés de service autres que courants. Si elle n'a pas été prévue dans les documents du marché, elle doit y être introduite par voie d'avenant. L'actualisation est simplement facultative pour les marchés de produits et de services courants.

L'actualisation n'est possible que si elle a fait l'objet d'un accord entre les parties. Dans le silence des stipulations contractuelles, l'actualisation est donc exclue lorsqu'elle a été mise en place par un additif au marché adressé de façon unilatérale par l'administration, après la signature du marché et sans négociation avec le titulaire (CE 28 mai 1982, SA Soprema, tables, p. 665 ). Elle n'est pas non plus applicable lorsqu'elle a été prévue par un document dépourvu de toute valeur contractuelle (CE 4 mars 1983, Etablissement L. Sorreaux Père et Fils, req. no 15228). Cette règle est applicable alors même que l'administration en aurait admis le principe en cours d'exécution du marché.

Il est possible pour les parties d'y renoncer d'un commun accord, postérieurement à la signature du marché, par lettre ou par voie d'avenant (TA Versailles 19 février 1982, SA La Dunoise c/Sivom de la région du Mesnil-Saint-Denis, R., tables, p. 667 ; CE 17 juin 1981,

Commune de Papeete, R., tables, p. 814).

Le prix actualisable reste cependant un prix ferme mais pourra, au début de l'exécution de la prestation, être revalorisé aux conditions économiques "correspondant à une date antérieure de trois mois à la date d'effet de l'acte portant commencement d'exécution des prestations" (c’était ce que prévoyait le décret no 2001-738 avant l’entrée en vigueur du nouveau code). Autrement dit, le prix ferme est revalorisé aux conditions économiques en cours, trois mois avant la notification. La revalorisation une fois effectuée, le prix reste fixe pendant toute la durée du marché. Un prix ferme dans le contrat se mue en un autre prix ferme dans l'acte portant commencement d'exécution des prestations.

Toujours selon ce décret, l'actualisation ne peut être prévue qu'une seule fois par marché.
Elle est faite en référence à un indice, à un barème ou à des mercuriales, par exemple. Cet indice n'est jamais l'indice général des prix (circulaire du 5 octobre 1987).

 

 

  1. Le prix ajustable

 

"Un marché est conclu à prix ajustable lorsqu'il prévoit que le prix de règlement est calculé à partir d'une référence figurant dans le marché et qui doit être représentative de l'évolution du prix de la prestation elle-même." Ce type de prix est utilisé surtout dans les marchés à bon de commande (circulaire du 5 octobre 1987), pour les fournitures courantes ou les prestations de service, lorsque les prix sont susceptibles de varier de façon importante et imprévisible, pendant la durée d'exécution du marché (produits pétroliers, denrées alimentaires, etc.). On l'utilise aussi dans les contrats pluriannuels où les livraisons sont échelonnées.

L'ajustement joue aussi bien à la hausse qu'à la baisse.

En matière de prix ajustable, il est possible de dégager deux hypothèses :
- soit le marché comporte des prix initiaux et, dans ce cas, ils évolueront par rapport à une

référence d'ajustement qui peut être une mercuriale ou un indice INSEE ad hoc ;
- soit le marché ne comporte pas de prix initiaux et, dans ce cas, les prix de règlement sont

calculés en appliquant un rabais à des références tirées de mercuriales, de cours (cours des halles, par exemple). Cette technique est souvent utilisée dans les marchés de produits périssables.

Il peut arriver qu'il n'existe pas de références indépendantes du titulaire du marché. L'acheteur public peut alors ajuster le prix sur le barème du fournisseur (son prix catalogue ou son tarif général ; réponse ministérielle no 31399, JOAN (Q), 25 décembre 1995, p. 5477).
Dans ce cas, selon la circulaire du 5 octobre 1987, plusieurs conditions doivent être réunies :
- le tarif de référence doit être appliqué à l'ensemble de la clientèle du titulaire ;
- les changements de tarifs sont possibles seulement après préavis ou par un différé

d'application ;

- le marché doit contenir une clause butoir (III-B.3.4), c'est-à-dire une possibilité

d'augmentation limitée en pourcentage ou en référence à la variation d'un indice ;

- le marché peut aussi contenir une clause de sauvegarde en cas de dépassement du butoir, cette clause pouvant prévoir la résiliation, sans indemnité, de la partie non exécutée ou, si celle-ci a déjà été exécutée, le remboursement à l'acheteur public des dépassements du butoir.

Outre la clause butoir, le prix ajustable peut comporter deux autres types de clause de sauvegarde :

- une clause de réintroduction de la concurrence lorsqu'un entrepreneur sollicite un ajustement. Elle autorise la collectivité locale dans un délai de quinze jours à trois semaines à rechercher s'il existe une entreprise moins chère que le titulaire. Si c'est le cas, elle lui demande de s'aligner sur celle-ci. Si le titulaire refuse, le marché est résilié;
- une clause dite "du seuil de déclenchement" qui autorise le réajustement, seulement s'il est supérieur à un taux. Il est utilisé pour des produits dont la variation de prix est très rapide, mais de faible amplitude.

 

 

 

  1. Le prix révisable

 

a)  Définition


Un marché est conclu à prix révisable lorsqu'il prévoit que le prix de règlement est calculé par application au prix initial figurant dans le marché d'une formule représentative de l'évolution du coût de la prestation."

Le prix révisable est donc un prix qui évolue à mesure de l'exécution de la prestation, pour tenir compte des conditions économiques concrètes rencontrées. Il est employé dans les marchés de longue durée en matière de travaux, de fabrications industrielles ou encore de prestations de service non courantes.

 

Les prix sont révisés au moyen d'une formule paramétrique qui, selon le contrat, représente les coûts de la prestation. L'article 3 du décret no 2001-738 impose à la clause de révision de prix d'inclure "un terme fixe dont la valeur minimale est de douze et demi pour cent". Et selon son alinéa 2, le marché doit, de surcroît, indiquer la date et le mois d'établissement du prix initial, ainsi que les modalités de la révision.

Sur ce point, la circulaire du 5 octobre 1987 rappelle plusieurs règles :
- la formule de révision ne peut pas reposer sur des paramètres dont l'évolution dépend de la volonté du titulaire du marché. En général, ces paramètres portent sur des indices, des index ou des prix publiés sous le contrôle de l'administration, celle-ci ne souhaitant pas contraindre trop fortement les entreprises par ce biais (Réponse ministérielle, no 840, JOAN (Q), 26 octobre 1981, p. 3039 ; Marchés publics, no 182, novembre 1981, p. 5);
- la révision peut ne pas porter sur la totalité du prix et ne concerner qu'une partie censée comporter des aléas particulièrement importants. Le reste est ainsi rassemblé dans le terme fixe de la formule paramétrique majoré en conséquence;

- un seuil de déclenchement de la formule de prix  peut être prévu. En fonction d'un certain plafond ou d'un certain pallier en pourcentage du marché, la clause peut jouer;
- plusieurs formules de révision de prix peuvent être prévues lorsque le marché comporte des prestations différentes quant à leur nature ou leur délai d'exécution.

 

b) La mise en œuvre de la révision de prix

 

Il semble légitime d'exclure la possibilité de modifier la clause de révision de prix en cours d'exécution du contrat. Cela revient à modifier les conditions initiales de la concurrence (en ce sens, CCM, Marchés publics, no 193, avril-mai 1983, p. 5). En revanche, l'acceptation par les parties d'une clause de révision de prix en cours d'exécution du marché suppose, bien sûr, un accord par chacune d'elles, accord formalisé dans un document porté à la connaissance de l'administration, dans les conditions prévues par le marché (CE 9 février 1980, Société Entreprise nouvelle de l'Ouest, p. 790).

 

Loi des parties, la formule de révision de prix est intangible tout au long de l'exécution du marché. Elle ne peut donc pas être modifiée par voie d'avenant (CCM, Marchés publics, no 178, juin 1981, p. 5).

 

La durée d'application de la révision de prix est liée à plusieurs éléments. Elle dépend avant tout de la durée d'application du marché. Mais elle peut être prolongée de plusieurs manières :
- lorsque le délai contractuel d'exécution est lui-même prolongé par voie d'avenant, celui-ci devant prévoir la reconduction de la révision des prix aux conditions du marché (CE 11 mars 1976, Vuillemin, p. 164)

- lorsque le dépassement du délai contractuel "est imputable au retard apporté par d'autres corps de métier dans l'accomplissement de leurs travaux" (CE 28 octobre 1964, Société SEPEC, Actualité juridique droit administratif, 1964, p. 715, observations J. Montmerle) ;
- lorsque la prolongation des délais contractuels est la conséquence de sujétions imprévues (CE 13 décembre 1961, Ministre des Travaux publics c/Société nationale de construction, p. 706).

Le point de départ de l'application de la clause de révision de prix doit normalement correspondre à la date d'effet de l'acte portant commencement d'exécution des prestations (Télégramme des marchés publics, novembre 1994, p. 3).

 

 

 

  1. Le prix provisoire

 

 

 

L’art 18 du NCMP 2004 dispose :

 

Les marchés négociés peuvent être conclus à prix provisoires dans les cas exceptionnels suivants :

1° Lorsque, pour des prestations complexes ou faisant appel à une technique nouvelle et

présentant soit un caractère d'urgence impérieuse, soit des aléas techniques importants,

l'exécution du marché doit commencer alors que la détermination d'un prix initial définitif n'est pas encore possible ;

2° Lorsque les résultats d'une enquête de coût de revient portant sur des prestations comparables commandées au titulaire d'un marché antérieur ne sont pas encore connus ;

3° Lorsque les prix des dernières tranches d'un marché à tranches, tel que défini à l'article 72 du présent code, doivent être fixés au vu des résultats, non encore connus, d'une enquête de coût de revient portant sur les premières tranches, conclues à prix définitifs ;

4° Lorsque les prix définitifs de prestations comparables ayant fait l'objet de marchés antérieurs sont remis en cause par le candidat pressenti ou la personne responsable du marché, sous réserve que celle-ci ne dispose pas des éléments techniques ou comptables lui permettant de négocier de nouveaux prix définitifs ;

 

II. - Les marchés conclus à prix provisoires précisent :

1° Les conditions dans lesquelles sera déterminé le prix définitif, éventuellement dans la limite d'un prix plafond ;

2° L'échéance à laquelle devra intervenir un avenant pour fixer le prix définitif ;

3° Les règles comptables auxquelles le titulaire devra se conformer ;

4° Les vérifications sur pièces et sur place que l'administration se réserve d'effectuer sur les

éléments techniques et comptables du coût de revient.

 

III. - Pour la réalisation des ouvrages mentionnés à l’article 1er de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, les marchés de maîtrise d’œuvre sont passés à prix provisoires conformément au décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d’œuvre confiées par des maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé.

 

 

 

Lorsque le marché comporte un prix provisoire, il doit préciser comment et dans quelles conditions les parties entendent passer du provisoire au définitif et, notamment, le prix plafond que ne devra pas dépasser le prix définitif, les phases ou échéances auxquelles les avenants devront intervenir pour fixer le prix définitif ainsi que les règles comptables auxquelles le titulaire devra se conformer. Par ailleurs, le titulaire du marché doit se soumettre à un contrôle particulier de l'administration selon des modalités (vérifications sur pièces et sur place) qui doivent avoir été précisées dans les documents contractuels.

À défaut d'avenant, seul le prix provisoire pourra être pris en compte  (CAA  Paris, 6 juin 1991, CH départemental Stell : Rec. CE, tables, p. 1047). Si le retard de fixation des prix définitifs est imputable à l'administration, elle devra en indemniser les conséquences dommageables  (CE, 20 févr. 1976, min. déf. c/Laboratoires René Derveaux : Rec. CE, p. 110).

 

 

  1. Le prix rectifié

 

Une autre dérogation au caractère définitif du prix initial a pour but de corriger les erreurs matérielles. Il arrive, parfois, que le prix indiqué dans le contrat soit entaché d'une erreur purement matérielle, de nature à provoquer des confusions (CE 3 juillet 1963, Entreprise Patry, p. 417 ; CE 26 novembre 1975, Société entreprise Py, tables, p. 1133 ; CAA Nancy 30 avril 1992, SA de Travaux Isolation, Bâtiment, Etanchéité, tables, p. 1106). Lorsque les deux parties au contrat reconnaissent la matérialité de l'erreur commise et que cette erreur est susceptible de contrarier leur intention commune de s'accorder sur le prix initial, dans ce cas, et dès l'instant où les parties sont d'accord pour rectifier l'erreur matérielle, il est possible de procéder à une modification contractuelle du prix. Le juge l'admet dans la mesure où la correction reste limitée et n'est pas de nature à remettre en cause les conditions de la mise en concurrence (CCM, Marchés publics, no 278, décembre 1993, p. 4 ; TA Versailles 19 octobre 1999, SARL Organet c/Ecole Polytechnique, req. no 96-1873 ; BJCP, 2000, no 10, p. 212).

 

 

  1. Les variations de prix et les variations imprévues des prestations

 

Les changements apportés au prix du marché peuvent donc résulter de la volonté des parties, et singulièrement de celle de la personne publique. L'autorité compétente pour passer le marché voit son pouvoir de modifier le prix du marché et, plus généralement, son coût limités par deux types de motifs:des motifs d'ordre comptable et budgétaire et des motifs liés à la sauvegarde des intérêts du cocontractant. Lorsque la collectivité publique décide de modifier certaines conditions du marché, dans ce cas, on admet volontiers que les droits de l'entreprise soient largement préservés par les dispositions du CCAG, sous réserve que les prestations, venant tant en diminution qu'en augmentation, aient été ordonnées par l'administration.
Les articles 15 et 16 du CCAG-Travaux, par exemple, définissent les limites d'augmentation ou de diminution imposées dans la masse des prestations à réaliser. Ces limites sont différentes selon que l'on se trouve en présence d'un marché à prix forfaitaire ou unitaire (par exemple, CE 12 mai 1982, Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône, p. 175).

 

a) Le marché à prix unitaire : l'indemnisation du titulaire pour travaux supplémentaires

 

Au moins quatre hypothèses peuvent être dégagées. En cours d'exécution du marché et hors des cas prévus par lui, il peut y avoir soit un accroissement des travaux, et dans ce cas il s'agit véritablement de rémunérer les travaux supplémentaires, soit un accroissement des quantités de prestations ou de travaux, soit une réduction des travaux ou des prestations prévues, soit enfin, l'apparition de sujétions imprévues.


- Les travaux supplémentaires non compris dans un marché à prix unitaire (et dans ses avenants, art. 15-1 du CCAG-Travaux ) réalisés par l'entreprise ouvrent à son profit un droit au règlement. Ce droit permet le paiement selon les prix prévus au marché (CE 3 octobre 1979, Société Entrasudo, tables, p. 797). Cependant, il n'est reconnu que dans la mesure où ces travaux ou prestations revêtent deux conditions alternatives :
- les travaux supplémentaires doivent avoir été réalisés sur ordre régulier du maître de l'ouvrage ou de son représentant régulièrement habilité (CE 25 juin 1975, Ville de Joigny, p. 389) ;
- les travaux doivent être indispensables à la réalisation satisfaisante de l'ouvrage ou de la prestation s'ils ont été effectués à la seule initiative de l'entreprise (CE 3 octobre 1979, Société Entrasudo, tables, p. 797 : à propos de travaux exigés par la société de contrôle pour des raisons de sécurité). Cette indemnisation des travaux indispensables est de droit, nonobstant les dispositions contractuelles qui excluent tout dépassement du montant du marché en l'absence d'ordre écrit du maître de l'ouvrage (CE 16 février 1962, SARL Orsini-Lartigues, tables, p. 1019). Par nature, les travaux indispensables à la réalisation de l'ouvrage sont indemnisés, sauf lorsqu'ils résultent des malfaçons et autres désordres dus à l'entreprise elle-même. Dans ce cas, l'indemnisation peut n'être que partielle (CE 19 avril 1991, Société Constructions, Restauration, Bâtiments industriels, Revue de droit immobilier, 1993, p. 33, observations F. Llorens et Ph. Terneyre ; Revue du droit public, 1992, p. 1535, observations F. Llorens). A fortiori, les travaux supplémentaires qui ne sont pas indispensables à la réalisation satisfaisante de l'ouvrage, conformément aux prescriptions des cahiers des charges, et qui n'ont pas été commandés par un ordre de service n'ouvrent pas droit à rémunération, alors même qu'ils ont été utiles à l'administration (CE Section 17 octobre 1975, Commune de Canari, R., 516 ; Actualité juridique droit administratif, 1975, p. 562, chronique M. Boyon et M. Nauwelaers).


- L'augmentation des quantités de travaux demandées à l'entreprise en sus de ceux prévus au marché ouvre droit à indemnisation. Ces travaux ou ces prestations qui ont été réalisés en nombre plus élevé que celui prévu au marché ouvrent droit au paiement par application des prix contractuels. Le marché peut organiser l'application de cette règle de plusieurs façons :

- il peut l'exclure. Autrement dit, le marché lui-même peut prévoir l'exclusion de toutes indemnisations quelle que soit l'importance de la variation des quantités d'ouvrages réalisés. Cependant, l'entreprise recouvre son droit à indemnité si l'augmentation des quantités ou de certaines d'entre elles est imputable à une faute de l'administration ou lorsque cette variation a bouleversé l'économie du contrat (CE 11 février 1983, Société entreprise Caroni, p. 59 ; Marchés publics, no 210, juin 1985, p. 15, commentaire M. François);

- il peut l'aménager (CE 1er avril 1998, SA Bec Frères, Revue de droit immobilier, 1998, observations F. Llorens et Ph. Terneyre ; BJCP, no 1/98, p. 105 ; Marchés publics, 1998, no 3, p. 14, observations Ph. Delelis). Pour cela, il peut faire référence au CCAG. Le CCAG-Travaux prévoit que l'entreprise a droit à être indemnisée du préjudice qu'elle a subi, au final, lorsque l'augmentation de la masse des travaux dépasse un quart de la masse initiale des travaux.

- La réduction de la masse des travaux demandés à l'entreprise en deçà du volume prévu au marché ouvre aussi droit à indemnisation. L' article 16 du CCAG-Travaux prévoit que seules les diminutions dépassant un cinquième de la masse initiale ouvrent droit à réparation du préjudice subi par l'entreprise. ll y a lieu, d'ailleurs, d'inclure dans cette indemnité la perte de son bénéfice (CE 12 mai 1982, Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône, précité).
Il faut distinguer la diminution de la masse des travaux des modifications importantes de l'objet du marché qui consistent, notamment, à supprimer la réalisation d'ouvrage essentiel du marché. Ces modifications sont requalifiées en résiliation partielle du contrat (CE 14 mars 1980, SA Compagnie industrielle de travaux électriques et mécaniques (CITREM), tables, p.790). Dans ce cas, l'entreprise a droit à une indemnité pour résiliation unilatérale.

- En cas de sujétions imprévues, l'entreprise exécutant un marché à prix unitaire peut prétendre à l'indemnisation du surcoût dû aux difficultés exceptionnelles et imprévisibles qu'elle a rencontrées dans l'exécution de son marché (CE 12 mai 1982, Société des autoroutes Paris-Rhin-Rhône, précité).

 

b)  Le marché à prix forfaitaire : l'indemnisation du titulaire pour travaux supplémentaires

 

Dans le cadre d'un marché à prix forfaitaire, par principe, l'entreprise ne peut pas obtenir de supplément de prix. Le prix forfaitaire couvre l'ensemble des travaux et prestations nécessaires à l'exécution du marché (Réponse ministérielle, no 21675, JOAN (Q), 8 février 1999, p. 785 ; CAA Bordeaux 22 juin 1998, Grands travaux de l'océan Indien, BJCP, 1999, no 2, p. 211). Par exemple, le caractère forfaitaire du marché interdit à l'entrepreneur de se prévaloir de ce que les difficultés liées à la nature du sol auraient été plus importantes que prévues (CE 27 juin 1969, Ministre des Armées c/ SA Fourré et Rhodes, R. tables 879). Cependant, et naturellement, même dans le cadre d'un marché à forfait, l'entreprise doit être indemnisée à raison des travaux non prévus au contrat qu'elle a été contrainte de réaliser pour la bonne exécution de l'ouvrage ou, a fortiori, qu'elle a effectués en vertu d'un ordre de service du maître de l'ouvrage. Sur le plan contractuel, les travaux supplémentaires donnent donc lieu à rémunération à deux conditions alternatives :

- s'ils sont exécutés sur ordre de service écrit . Un ordre de service s'impose au cocontractant qui ne peut pas refuser de l'exécuter. Il est donc logique que ces travaux supplémentaires ouvrent droit à rémunération, même dans le cas où ils ne sont pas indispensables. Ce droit à rémunération est subordonné à un ordre écrit, même lorsque cette forme n'est pas expressément imposée par le CCAG ;

- s'ils sont indispensables à la réalisation de l'ouvrage (CE 3 octobre 1979, Société Entrasudo, tables, p. 797). Dans ce cas, l'intervention d'un ordre de service n'est pas exigée, mais le caractère indispensable est contrôlé par le juge. Ne sont pas indispensables les travaux qui correspondent seulement à un accroissement des quantités prévues au marché (CE Section 17 octobre 1975, Commune de Canari, précité). Cette théorie des travaux indispensables comprend un volet supplémentaire par rapport au marché unitaire. En effet, le caractère indispensable des travaux doit être complété par un caractère d'imprévisibilité (aléas techniques dus à l'état du sous-sol, intempéries, etc.). Ces travaux réalisés par l'entreprise à sa seule initiative doivent donc être imprévisibles lors de la passation du marché et de nature à bouleverser son économie (CE 28 juillet 1989, Ville de Menton c/Ivaldi, Revue du droit public, 1991, p. 291, observations F. Llorens ; TA Paris 30 novembre 1999, Société Dioguardi France, BJCP, 2000, no 10, p. 213).

Lorsqu'une des conditions est remplie, l'entreprise est régulièrement rémunérée sur la base des prix du marché.


En dehors des relations contractuelles, les travaux supplémentaires peuvent être indemnisés sur le fondement de la théorie de l'enrichissement sans cause. Les conditions posées par cette théorie sont assez rigoureuses. En droit administratif, cette théorie s'applique lorsqu'un contrat a été exécuté alors que finalement il n'a pas été conclu (CE Section 2 décembre 1966, Société France-Reconstruction-Plan, p. 635), ou encore qu'il n'a pas été approuvé par l'autorité de tutelle (CE 10 octobre 1963, OPHLM de la ville de Dole, tables, p. 926) ou enfin qu'il est entaché de nullité (CE 19 avril 1974, Société Entreprise Louis-Segrette, tables, p. 1057 ; TA Paris 14 décembre 1999, Société Dataid, BJCP, 2000, no 10, p. 175, conclusions T. Célérier). Dans ces trois hypothèses, l'entreprise peut être remboursée des dépenses utiles qu'elle a effectuées et dont l'administration a tiré profit. La particularité tient ici au fait que si des travaux entrepris sur ordre de service écrit ou des travaux indispensables donnent lieu à une véritable rémunération sur la base des prix figurant au marché (bénéfices inclus donc), l'indemnisation des travaux utiles est limitée au profit que l'administration en a retiré, ce que l'on appelle l'"enrichissement du maître de l'ouvrage". De surcroît, le juge refuse, dans ce cadre, toute indemnisation automatique des travaux supplémentaires simplement utiles (CE Section 17 octobre 1975, Commune de Canari, précité).


L'entreprise dispose aussi d'un droit à indemnité, en cas de variation dans l'ampleur des travaux à effectuer. C'est ainsi que lorsque le marché le prévoit, elle a droit au paiement de l'augmentation des quantités prévues à ce marché (CE 24 octobre 1990, RIVP c/Etablissement Louis et autres, Revue de droit immobilier, 1991, p. 52 observations F. Llorens et Ph. Terneyre). Le CCAG-Travaux (art. 15 et 16) prévoit l'indemnisation de l'entreprise, lorsque la variation, en plus ou en moins du volume des travaux et prestations, est supérieure à 1/20 des travaux et prestations prévues au marché.


L'entreprise peut être indemnisée des travaux supplémentaires qu'elle a dû réaliser en raison d'une faute du maître de l'ouvrage ou du maître d'oeuvre. Ces fautes peuvent trouver leur origine, par exemple, dans certaines déficiences des documents techniques soumis à l'appel d'offres (CE 12 mai 1989, Société Fougerolle France, req. no 81896). L'indemnisation de l'entreprise est réduite à proportion de sa négligence dans les vérifications nécessaires, vérifications, par exemple, des informations fournies par le dossier de consultation (même arrêt).

La théorie des sujétions imprévues est aussi applicable dans les marchés à prix forfaitaire mais à des conditions de mise en oeuvre plus rigoureuses que dans les marchés à prix unitaires. L'entreprise n'aura droit à indemnisation des travaux supplémentaires qu'elle a réalisés en raison de sujétions imprévues que dans la mesure où ces sujétions ont l'un des caractères suivants:

- elles ont été exceptionnelles, imprévisibles et de nature à bouleverser l'économie du contrat (CE 23 juin 1993 SA Roussey).

- elles sont imputables à un fait de l'administration (CE 17 juin 1985 Société Cogeci , Revue du droit public 1986, p. 1729, observations F. LLORENS ; CE 21 février 2000, OPHLM ville de Nice , req. no 187257 ; BJCP no 10-2000, p. 213 : à propos de l'indemnisation due à une entreprise pour interruption prolongée du chantier à l'initiative de l'administration).

 

 

 

 

 

 

Le problème que soulève le recours aux avenants

 

La modification du prix s’opère, notamment, par voie d’avenants.

Ce dernier doit permettre d’offrir une réponse ponctuelle à une difficulté d’exécution du MP – l’avenant s’attache alors  à un contrat existant et s’intègre à celui-ci, il ne s’agit donc pas d’un nouveau contrat.

 

Les parties peuvent recourir à l’avenant pour :

 

-         donner un cadre juridique à la poursuite de l’exécution des prestations lorsque le montant des prestations exécutées atteint le montant prévu par le marché

-         pour laisser à l’entrepreneur la poss de reporter à une date postérieure la date de mise service effective de l’ouvrage

-         pour prolonger les délais contractuels de réalisation du marché

 

L’avenant ne doit jamais dissimuler un nouveau contrat (sauf sujétion technique imprévue ne résultant pas de la volonté des parties), pas plus qu’il ne doit modifier l’objet , ou encore bouleverser l’économie du contrat.

 

- l’avenant ne doit donc pas bouleverser l’éco du marché ou l’objet du marché (= le juge à défaut considérera qu’il y un nouveau contrat). Le juge apprécie les  conséquences de l’avenant sur le montant du prix du MP initial (appréciation casuistique = car il n’y pas de critère pour définir à partir de quel seuil l’éco. du marché est bouleversée)

 

Pour MINEFI = il ne devrait pas y avoir d’avenant au-delà de 15% pourtant il arrive que le juge soit assez accueillant cf. CE, 13 juin 1997, Cne d’Aulnay ss Bois : 2 avenants successifs de 450 KF et 600 KF pour un MP d’un montant total de 2,7 millions de francs). Conséquences en cas d’irrégularité du recours aux avenants = illégalité requalif en nouveau contrat dc = nouveaux régimes : obligation de publicité et de mise en conc.

 

- Risq de la multiplication des avenants : régulariser un projet économiquement non viable et risq de favoritisme = prix anormalement bas pour s’affranchir de la mise en conc. = constitution du délit et rééquilibrage du prix avec des avenants successifs

 

- Risq de changement d’objet du contrat, ex. si avenant porte sur une prestation non initialement prévue au contrat = modif de l’objet du marché. (dans ce cas seule l’hypothèse des sujétions techniques imprévues peuvent justifier le recourt aux avenants même s’il y a bouleversement éco.)

 

 


 

PRIX PROVISOIRES

(Déterminés après l’entrée en vigueur du marché)

 

 

PRIX INITIAUX

(Déterminés avant l’entrée en vigueur du marché )

 

 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extrait du DÉCRET N°2004-15 DU 7 JANVIER 2004 PORTANT CODE DES MARCHÉS PUBLICS

 

 

Chapitre VII - Prix du marché

 

Article 16

Les prix des prestations faisant l'objet d'un marché sont soit des prix unitaires appliqués aux

quantités réellement livrées ou exécutées, soit des prix forfaitaires appliqués à tout ou partie du marché, quelles que soient les quantités.

Des clauses incitatives liées aux délais d'exécution, à la recherche d'une meilleure qualité des

prestations et à la réduction des coûts de production peuvent être insérées dans les marchés.

Article 17

Sous réserve des dispositions de l'article 18, un marché est conclu à prix définitif.

Un marché est conclu à prix ferme dans le cas où cette forme de prix n'est pas de nature à exposer à des aléas majeurs le titulaire ou la personne publique contractante du fait de l'évolution raisonnablement prévisible des conditions économiques pendant la période d'exécution des prestations. Le prix ferme est actualisable dans des conditions fixées par décret. Un marché est dit à prix ajustable ou révisable lorsque le prix peut être modifié pour tenir compte des variations économiques dans des conditions fixées par le décret mentionné à l'alinéa précédent. Lorsqu'un marché comporte une clause de variation de prix, il fixe la périodicité de mise en œuvre de cette clause.

Article 18

I. - Les marchés négociés peuvent être conclus à prix provisoires dans les cas exceptionnels

suivants :

1° Lorsque, pour des prestations complexes ou faisant appel à une technique nouvelle et

présentant soit un caractère d'urgence impérieuse, soit des aléas techniques importants,

l'exécution du marché doit commencer alors que la détermination d'un prix initial définitif n'est pas encore possible ;

2° Lorsque les résultats d'une enquête de coût de revient portant sur des prestations comparables commandées au titulaire d'un marché antérieur ne sont pas encore connus ;

3° Lorsque les prix des dernières tranches d'un marché à tranches, tel que défini à l'article 72 du présent code, doivent être fixés au vu des résultats, non encore connus, d'une enquête de coût de revient portant sur les premières tranches, conclues à prix définitifs ;

4° Lorsque les prix définitifs de prestations comparables ayant fait l'objet de marchés antérieurs sont remis en cause par le candidat pressenti ou la personne responsable du marché, sous réserve que celle-ci ne dispose pas des éléments techniques ou comptables lui permettant de négocier de nouveaux prix définitifs ;

II. - Les marchés conclus à prix provisoires précisent :

1° Les conditions dans lesquelles sera déterminé le prix définitif, éventuellement dans la limite d'un prix plafond ;

2° L'échéance à laquelle devra intervenir un avenant pour fixer le prix définitif ;

3° Les règles comptables auxquelles le titulaire devra se conformer ;

4° Les vérifications sur pièces et sur place que l'administration se réserve d'effectuer sur les

éléments techniques et comptables du coût de revient.

III. - Pour la réalisation des ouvrages mentionnés à l’article 1er de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée, les marchés de maîtrise d’œuvre sont passés à prix provisoires conformément au décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d’œuvre confiées par des maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé.

Chapitre VIII - Avenants

Article 19

Sauf sujétions techniques imprévues ne résultant pas du fait des parties, un avenant ne peut

bouleverser l'économie du marché, ni en changer l'objet.

 

 



[1] Lamy, Droit Public des Affaires 2003 (ref. 2817 p. 1219)

[2] Jurisclasseur (fasc. 650 précité, point 6)

[3] Jurisclasseur fasc. précité

[4] Lamy, Droit Public des Affaires 2003 (ref. 2820, p. 1220)