LA DEMATERIALISATION DES PROCEDURES DE MARCHES PUBLICS

 

 

 

 

 

 

Introduction :

 


La technologie Internet permet à la fois d’assouplir les temps et les modes de communication et de diminuer les coûts. Les solutions d’achat en ligne (e-procurement) représentent une nouvelle opportunité pour rendre les processus d’achat plus efficaces.

 

 

Les enjeux de la dématérialisation des MP

 

La mise en ligne de l’achat public s’inscrit dans une volonté politique d’inscrire l’administration dans l’ère de l’internet et de la rationalisation. Cette volonté est tant européenne que française.

 

Au niveau européen

 

L’Europe considère le recours aux nouvelles technologies de l’information (NTIC ou TIC) comme une priorité, tant dans le secteur privé que dans le secteur public.

 

Deux objectifs : meilleure qualité et rationalisation des administrations.

Depuis le conseil européen de Lisbonne,  l’administration en ligne est considérée comme un facteur important de croissance économique (SP nouveaux offerts à tous les citoyens et à toutes les entreprises d’Europe).

 

La généralisation de l’e-administration, donne une place importante à l’e-procurement (ou marché public en ligne). Car le développement de  la passation électronique des MP doit permettre aux administrations de réaliser des gains de productivité.

 

Selon la Communication de la Commission, Stratégie pour le marché intérieur – Priorités 2003-2006 du 7 mai 2003, « une réduction des coûts de 5% obtenue grâce à l’instauration d’un système plus concurrentiel et plus efficace de MP permettrait  (…) des économies de plus de 70 milliards d’euros, c’est-à-dire plus de quatre fois le budget de l’éducation au Danemark ».  La Commission européenne préconise donc le recours exclusif aux procédures électroniques avant 2010.

 

Au niveau national

 

Soucis de moderniser et de rationaliser les interventions publiques. La commande publique  représente aujourd’hui plus de 9% du PIB national (soit 110 milliards d’euros). Le passage aux MP en ligne apparaît donc comme une nécessité.

 

.Première étape avec la publication en 2001 du nouveau code des MP permettant une dématérialisation  intégrale des procédures de passation. Remplacement des écrits sur support papier par des écrits sur support électronique.

 

.Deuxième étape, fixé au 1er janvier 2005, interdit aux acheteurs publics de refuser une offre électronique.

 

 

Difficultés juridiques

 

Le code des MP pose les bases nécessaires à la dématérialisation des procédures de passation dans son article 56. En outre différents textes organisent la dématérialisation : le décret de 30 avril 2002 relatif à la dématérialisation des procédures de passation des MP, ainsi que le décret du 18 septembre 2001 relatif aux enchères électroniques et la loi du 13 mars 2000  portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l’information et relative à  la signature électronique.

 

Il est donc possible à l’administration de transmettre l’ensemble des documents de consultation des entreprises par voie électronique.

 

Lorsque la personne publique sera dans l’obligation d’accepter de recevoir des candidatures par voies électroniques (1er janvier 2005), la transmission devra pouvoir faire l’objet d’une date certaine et devra se faire dans le respect des règles édictées par la loi du 13 mars 2000.        Or il n’existe aucun texte permettant, à ce jour, l’officialisation de l’horodatage ; et les décrets d’application relatifs à la loi sur la signature électronique n’ont pas tous encore été pris.

 

Le rapport du MINEFI conseil donc aux acheteurs publics de se forger leur opinion par la pratique, voire par la jurisprudence, mais ne pas attendre la théorisation préalable des risques possibles.

 

 

 

I - La dématérialisation du dossier de consultation

 

A- Les obligations à la charge de la personne publique

 

 

L’indication des conditions d’accès dans la publicité

 

Lorsque le dossier est mis à disposition sur un réseau informatique, la personne publique doit en préciser les modalités d’accès dans l’avis d’appel public à la concurrence.

 

L’ensemble des candidats doit pouvoir disposer du même degré d’information quant à la possibilité d’accéder rapidement aux documents de la consultation. En effet, le défaut d’information sur l’accès au dossier par voie électronique peut créer une disparité entre les candidats ayant des répercussions sur le temps effectif dont ils disposent pour élaborer les offres. L’absence, même involontaire, de cette mention dans les avis d’appel d’offres constituera, probablement, un motif de saisine du juge des référés pour manquement aux obligations de publicité, les acheteurs publics doivent donc être extrêmement vigilants.

 

Le principe selon lequel la publicité doit mentionner les modalités d’accès aux réseaux informatique fait l’objet d’une exception express en ce qui concerne les marchés en procédures adaptées (anciennement procédures négociées sans formalités préalables).

 

Ces marchés sont des contrats, qui, en application de l’article 11 du CMP, échappent au principe selon lequel ils doivent obligatoirement prendre une forme écrite. Dans la mesure où ils n’ont pas à faire l’objet d’un acte d’engagement et de cahier des charges, la question des modalités d’accès au dossier de la consultation devient, dès lors, sans objet. La personne publique fixe elle-même les règles de passation propres à ces marchés.

 

Dans le soucis de respecter les principes régissant la commande publique et, notamment, l’égalité de traitement des candidats, il est recommandé d’indiquer, sous forme écrite, aux entreprises mises en concurrence, les conditions d’accès par voie électronique au dossier de la consultation, dès lors que la personne publique a prévu d’en établir un.

 

 

Les destinataires du dossier de la consultation

 

Le CMP utilise le terme de « candidat » pour viser les entreprises susceptibles de déposer une candidature ou une offre. Le décret du 30 avril 2002 fait apparaître la notion de « personnes intéressés ». Puisqu’il n’est pas précisé à quoi ces personnes sont intéressées, l’accès aux documents ne doit pas être limité aux seules entreprises potentiellement candidates mais être élargi à tout professionnel ou particulier qui souhaiterait avoir accès au dossier. Si la transmission « classique » d’un dossier sur support papier peut s’avérer coûteuse pour la personne publique, la transmission de dossier par voie électronique présente, en revanche, le même coût qu’il y ait un seul retrait ou plusieurs dizaines.

 

Quoi qu’il en soit les notions de « personnes intéressés » et de « candidat s» sont respectivement réservées, par le décret, aux procédures ouvertes et aux procédures restreintes. Ainsi si toute personne, dès lors qu’elle est intéressée, peut retirer un dossier dans le cadre d’une procédure ouverte, seules les entreprises invitées à déposer une offre dans le cadre d’une procédure restreinte doivent avoir accès au dossier.

 

 

Les documents accessibles

 

Le règlement de la consultation constitue le document incontournable qui, pour n’importe quelle procédure, doit être accessible à toute personne intéressée.

 

En outre, la notion de « cahier des charges » impose à la personne publique de mettre à disposition outre les pièces traditionnelles constituant le dossier de consultation des entreprises, les pièces contractuelles constituant le marché. Les cahiers des charges comprennent les documents particuliers qui contiennent les clauses propres au marché et les documents généraux réunissant les dispositions applicables à toute une catégorie de marchés. Ces documents généraux sont les cahiers des clauses administratives et techniques générales (CCAG et CCTG) auxquels la personne responsable du marché peut décider de faire référence dans son marché. Ces CCAG et CCTG doivent donc être accessibles sur le réseau informatique mis en place par la personne publique au même titre que le reste du dossier de consultation.

 

 

B- Les obligations à la charge des candidats

 

 

La liberté de choix des candidats

 

Les candidats sont libres d’accepter ou de refuser la dématérialisation du dossier de la consultation. Il s’agit de respecter les principes de liberté d’accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats. Les petites et moyennes entreprises ne doivent pas être exclues de la commande publiques parce qu’elles ne disposent pas de moyens informatiques suffisant.

 

 

L’identification des candidats

 

L’absence d’identification préalable n’est pas de nature à rendre irrecevable une offre, mais elle fait courir à l’entreprise le risque de ne pas être informée des éventuelles modifications apportées au dossier, et ce, sans contestation possible.

 

Il s’agit ici d’une identification simple sans procédure d’authentification par l’utilisation d’une signature électronique sécurisée. La personne qui dépose l’offre n’est pas nécessairement celle qui a retiré le dossier.

 

Mais il reste encore souhaitable que la PRM demande aux candidats qu’ils accusent réception du dossier de consultation par l’envoi d’un courrier électronique explicite.

 

 

 

II - La transmission des candidatures et des offres par voie électronique

 

A- Les conditions de la transmission

 

 

Des modalités de transmission à clarifier dès la publicité

 

Lorsque la personne publique souhaite interdire la dématérialisation des candidatures et des offres, elle doit l’indiquer expressément dans la publicité. L’interdiction est expresse. Cette interdiction est limitée dans le temps et n’est envisageable, pour les personnes publiques, que jusqu’au 31 décembre 2004.

 

Un nouveau motif d’annulation des marchés pourra résulter du manquement à l’obligation d’être en mesure de réceptionner une candidature ou une offre par voie électronique. Mais les candidats écartés ne doivent pas pouvoir profiter de ce manquement pour demander au juge administratif l’annulation des marchés.

 

En ce qui concerne l’acceptation du dépôt des candidatures et des offres par voie électronique, il est demandé à la personne publique d’indiquer clairement, dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans la lettre de consultation pour les marchés à procédures adaptées, d’une part, sa décision d’accepter de recevoir les candidatures ou les offres par voie électronique, et d’autres part, les modalités concrètes de transmission. L’autorisation de dématérialiser doit, elle aussi, être expressément mentionnée dans la publicité. Le silence de l’administration ne signifie pas acceptation tacite.

 

Dans l’hypothèse d’une absence totale de mention concernant la dématérialisation des candidatures et des offres dans la publicité, on peut supposer que l’absence de renseignements devenus obligatoires peut constituer un motif d’annulation du marché, invocable par les candidats.

 

 

Le nécessaire choix du mode de transmission par les candidats

 

Lorsque la dématérialisation des candidatures et des offres est autorisée, l’article 5 du décret impose aux candidats d’opter pour un mode précis de transmission, sans possibilité d’en combiner plusieurs pour une même candidature ou pour une même offre (le doublement des envois entraînerait le rejet des deux envois).

 

En revanche, il semble possible qu’un candidat envoie sa candidature par voie électronique et son offre sur support papier, ou inversement.

 

 

La sécurisation et la confidentialité

 

La personne publique doit assurer « la sécurité des transactions sur un réseau informatique accessible à tous les candidats de façon non discriminatoire » (article 7 du décret du 30 avril 2002). Et c’est la personne publique qui est tenue responsable des éventuels piratages effectués entre l’envoi et la réception des candidatures ou des offres. Sa responsabilité est directe et entière. Elle peut ensuite engager la responsabilité contractuelle du prestataire de service l’ayant assisté pour la mise en place du système informatique.

 

La transmission des candidatures et des offres doit pouvoir faire l’objet d’une date certaine de réception et d’un accusé de réception électronique.

 

En outre la personne publique doit garantir la sécurité et la confidentialité des informations portant sur les candidatures et offres, et elle doit conserver celles-ci afin qu’elles ne soient pas ouvertes avant les réunions de la commission d’appel d’offres d’ouverture des plis.

 

Pour garantir cette sécurité, « la PRM peut demander aux candidats d’assortir leurs fichiers d’un système de sécurité tel que les candidatures et les offrent ne puissent être ouvertes qu’avec leurs concours » (art. 8 al. 2). L’idéal étant que le candidat soit contacté à une date et heure prévues pour communiquer les données nécessaires au déverrouillage. Cette disposition permet à la personne publique de s’exonérer de sa responsabilité. L’absence d’efficacité du système de sécurité entraîne une coresponsabilité entre la personne publique et la candidat, voire la responsabilité exclusive de ce dernier.

 

 

La signature électronique

 

Les candidatures et les offres doivent êtres signées conformément aux exigences posées aux articles 1316 et 1316-4 du code civil procédant de la loi du 13 mars 2000 portant adaptation de la preuve aux technologies de l’information et relative à la signature électronique.

 

La signature électronique doit être sécurisée et présenter les caractéristiques suivantes :

-être propre au signataire

-être créée par des moyens que le signataire puisse garder sous son contrôle exclusif

-garantir avec l’acte auquel elle s’attache un lien tel que toute modification ultérieure de l’acte soit détectable

 

Les entreprises doivent faire certifier leur signature électronique auprès d’un prestataire qualifié. Avec la délivrance de ce certificat, l’origine de la signature est garantie par le prestataire de services de certification.

 

 

B- Les aléas inhérents à la transmission informatique

 

 

Le double envoi

 

 

Le principe

 

La notion de double envoi ne doit pas être confondue avec le principe de la double enveloppe qui régit le formalisme de l’appel d’offre ouvert. Le double envoi correspond aux règles  permettant de faciliter la transmission électronique des offres quelle que soit la procédure suivie. La PRM peut autoriser les candidats à envoyer leur offre sous la forme d’un double envoi électronique, afin d’éviter tout retard consécutif aux aléas de transmission électronique.

 

Si elle autorise ce double envoi, la PRM doit préciser, dans l’avis d’appel public à la concurrence ou dans la lettre de consultation, le délai maximal qui peut séparer la réception de la signature électronique (premier envoi) de la réception de l’offre elle-même. Ce délai est réglementairement limité à 24 heures sous peine d’irrecevabilité de l’offre.

 

 

La mise en œuvre

 

Lorsque la signature électronique et l’offre sont réceptionnées avant la date limite du dépôt des offres, l’écart de 24h entre les deux réceptions doit être respecté. Dans le cas inverse l’offre est irrecevable même si le second envoi est réceptionné avant la date et l’heure limite. Une interprétation souple du décret qui ne tiendrait pas compte de ce délai maximal serait de nature à rompre le principe d’égalité de traitement des candidats devant la commande publique.

 

Si seule la signature électronique sécurisée est réceptionnée avant la date et l’heure limites, et si le délai qui sépare les deux réceptions entre dans le cadre de l’écart maximal autorisé par la PRM, l’offre doit être déclarée recevable.

 

En somme l’offre n’est recevable que si la signature est reçue avant la date et l’heure limites et si le délai qui sépare les réceptions de cette signature de l’offre, ne peut excéder celui fixé par la personne responsable du marché qui, en tout état de cause, ne doit pas être supérieur à 24h.

 

 

Les virus informatiques

 

La détection du virus doit s’opérer avant ouverture du document. Le document contenant un virus est réputé ne jamais  avoir été reçu. Le candidat doit donc être avisé de la détection du virus, et si les délais le lui permettent il pourra compléter sa candidature ou son offre.

 

 

 

 

 

Conclusion :

 

Difficultés techniques

 

Difficultés relevant de l’informatique

 

Insuffisance notoire des technologies en terme de capacités de stockage des données, de consultation de ces données, d’archivage, de téléchargement, de fiabilité des échanges numériques, de sécurisation, etc.

 

 

Exemple :

 

Si le principe d’égalité d’accès à la commande publique suppose que toutes personnes intéressées puisse consulter ou télécharger les documents pertinents quelle que soient ses capacités techniques d’accès, le décret du 30 avril 2002 ne précise cependant pas de standards techniques actuels ou à venir pour l’échange des fichiers. Tous les candidats ne sont donc pas assurés d’avoir accès à l’information.

 

 

Difficultés relevant de l’organisation des acheteurs publics

 

Les dossiers des acheteurs publics sont très différents selon les branches d’activités. Les dossiers sont également très différents selon le montant du marché et la taille des candidats.

 

Reste également la question de l’effort financier que les CL et les EP auront à fournir, d’ici 2005, afin d’intégrer dans leur politique les procédures dématérialisées.

 

 

Les recommandations du rapport du ministère de l’Economie afin de favoriser la dématérialisation

 

 

Douze mesures à mettre en œuvre pour faciliter le passage à l’e-procurement :

 

-Association des services acheteurs (regroupement de leurs achats et mutualisation de leurs ressources) >> permet la mise en place d’une plateforme de dématérialisation correspondant à leurs besoins

-publication en ligne de tous les documents de consultation des entreprises d’appel d’offres ouverts pour 2004

-expérimentation de la signature électronique

-développement des enchères électroniques inversées

-communication plus importante autour de la dématérialisation (les avantages)

-mutualisation entre services acheteurs des cahiers des charges, documents types…

-mise en place de commandes directement auprès des fournisseurs

-mise en place des cartes d’achat

-standardisation des documents

-expérimentation plus nombreuses de dématérialisation, depuis la passation des marchés jusqu’au contrôle de légalité et à la dématérialisation des factures

-définition et mise en place de services généraux sous l’égide de l’agence pour le développement de l’administration électronique en coordination avec la mission pour l’économie numérique.